Comment faire pour attirer le regard sur soi, quand on traverse une mauvaise passe au point de tutoyer la faillite ?

C’est le cas de la situation financière du parti d’extrême-droite qui s’en sort plutôt bien avec un prêt fictif délictueux à ses députés pour qu’ils achètent (gratuitement) des kits de campagne facturés par un micro-parti-maison dont le responsable, le sulfureux Frédéric Chatillon, a été condamné à trente mois de prison dont dix fermes pour escroquerie. Le RN pour recel d’abus de biens sociaux !

Pour Marine Le Penc’est une victoire“…elle s’attendait à pire ! “Comment faire confiance aux partis politiques…”avait souligné la présidente du tribunal dans son délibéré ?

Il est vrai que le personnage de confiance de la famille Le Pen fut un responsable parisien du Groupe d’union défense, le fameux GUD, groupuscule de l’extrême-droite radicale particulièrement violent en même temps qu’il entretient des relations en Syrie et au Liban, affiche un anti-sémitisme à toute épreuve et fréquente les noyaux durs de la fachosphère, avec toute la confiance de la patronne du parti fondé par le père, Jean-Marie Le Pen en 1972, carrément évincé de tous droits sur la formation politique qu’il a pilotée comme l’unique chef. Parvenant à disputer -sans aucune chance- la présidence de la République à Jacques Chirac en 2002, trente après.

Et cela s’est renouvelé en 2017 avec la fille, poussant le père vers la sortie pour évacuer quelques traces de cette marque de fabrique indélébile. Face à Macron qui avait sorti de son chapeau un rassemblement assez classique, mêlant une partie de la droite, du PS, du Centre et des Verts,  la “parricide”, élevée aux “valeurs” paternelles du patriotisme ultra-nationaliste, a plafonné, faute d’alliés.

 

Pourtant, comme ses cibles libérales de droite et de gauche, elle ne met jamais en cause le système capitaliste et l’exploitation des peuples d’où partent toutes les inégalités, les injustices, les violences, rendant la critique de la mondialisation sans consistance, une simple posture.

RN, sous le signe de la vierge ascendance gaulliste ?

Rien ne l’arrête ! Le Général De Gaulle avait été ramené au pouvoir par l’action de l’OAS, l’état-major de l’armée et les partisans de l’Algérie française épaulant “les forces de l’ordre”et le contingent bien peu motivé, pour combattre la résistance algérienne et donc, refuser par les armes, l’indépendance de ce qui était un département français depuis 1830 habité par 90% d’autochtones et dirigé par des Français.

Le Gl De Gaulle a été la cible d’attentats dont un, au Petit Clamart, fomenté par l’OAS en août 1962 qui a failli réussir ! La perte de l’Algérie est toujours pour le RN un noeud irréconciliable avec l’arrivée de De Gaulle au pouvoir qui, quatre ans après, signait les accords d’Evian.

Au FN comme au RN, ils ont maintes fois changé de tactique, pas de fond, à commencer sur l’Europe qu’il fallait quitter pour sauver la patrie, puis on ne la quittait plus, pour la gagner de l’intérieur aux mots d’ordres simplistes autant que radicaux , fermons les frontières, arrêtons l’immigration, chasse aux sans-papiers… sans toucher l’essentiel : la sacro-sainte propriété du capital avec la conservation du patrimoine colonial dont se sont emparés les futurs maîtres de la planète depuis 5 siècles.

Voilà que le père, toujours vivant, Marine Le Pen surprend son monde en franchissant un obstacle qui paraissait rédhibitoire.  Le général De Gaulle avait appelé, le 18/6/40, au refus de la capitulation de la France de Pétain laissant entrer l’ennemi heréditaire chez elle en lui fournissant les clés et l’hospitalité !

Simultanément, le 10 juillet 1940, les communistes appelèrent à la résistance qui s’organisa autour de réseaux qui n’en feront plus qu’un. L’extrême-droite avait organisé une émeute devant le parlement le 6 février 1934 qui avait fait 15 morts. Elle devait se montrer proche de l’occupant et de la police de Vichy.

Il s’en suivit, bien avant la capitulation allemande, l’élaboration d’un programme pour l’après-guerre, construit par un Conseil national de la Résistance, plan d’action qui sera adopté le 15 mars 1944 et qui donnera lieu aux fondements de ce qui deviendra “les jours heureux“, le modèle social le plus audacieux, le plus progressiste, le plus pluraliste que la France et le monde aient connu. Et il n’y a pas plus de RN aujourd’hui pour le défendre qu’hier pour le soutenir !

Pourtant, l’enjeu de “l’après-crise” aujourd’hui est de même portée civilisationnelle.

Puis suivirent les procès des collaborateurs qui n’assumèrent pas toujours leur adhésion au nazisme, à ses objectifs, les mettant en oeuvre de mille manières en toute conscience. Beaucoup sont passés entre les mailles du filet et ont trouvé un abri, parfois très loin, parfois incognito. Ils ne restent pas très nombreux aujourd’hui mais leurs idées ont retrouvé des couleurs au coeur de l’Europe. Comment ne pas le constater ? Et ne pas faire preuve de beaucoup de vigilance et de hardiesse pour sortir des mêmes schémas où l’on voudrait nous enfermer !

Au moment où une crise de très forte amplitude secoue à nouveau le monde et installe le doute sur son isssue tant elle est puissante et multiple, le RN qui butte toujours sur son isolement lors des seconds tours croit avoir frappé les esprits.

A la veille d’un deuxième tour de scrutin le 28 juin et plus encore, à moins de deux ans, de la présidentielle, il découvre De Gaulle, celui que les généraux félons d’Alger, avaient en tête de renverser en 1958, et même d’assassiner (au Petit Clamart) après quatre ans de guerre qui en demandera encore quatre autres pour reconnaître son indépendance à l’Algérie !

Comme si Marine Le Pen avait compris que seule contre toute à droite, elle se heurterait à l’alliance des libéraux de droite et de gauche contre une extrême-droite tout autant libérale mais isolée. Alors que si elle se “recentre” parmi les admirateurs du Gl De Gaulle, par exemple, symbole de l’unité du pays dans la résistance et d’une Vè République qui a tenu 62 ans, elle peut faire barrage à une candidature de la gauche et des écologistes, en mesure de se qualifier et servir d’appoint si besoin. Tout en espérant arriver en tête. Mais il faut beaucoup de crédulité !

La stratégie du RN ce n’est plus fédérer la nébuleuse d’extrême-droite mais fédérer la droite gaulliste derrière les idées portées par le RN pour que Macron ne l’aspire pas. C’est largement en cours. Et c’est aussi ce que sa nièce essaie de faire : recycler le RN à droite en se référant au général dont la mémoire reste populaire.

La tenue de camouflage présente quelques avantages. Ce n’est pas Mariani, l’ancien ministre de Sarkozy, qui nous dira le contraire. Lui, il a franchi l’obstacle dans l’autre sens sans le moindre état d’âme. Comme Dupont-Aignan qui a connu le RPR, le RPF, l’UMP. Comme Mégret qui appartenait au comité central du RPR…ils sont dans la dédiabolisation, étant si près ! Les passerelles sont nombreuses et puis on ne quitte pas la famille libérale. Philippot ne venait pas de si loin mais il tient le même discours.

Rien d’incompatible avec des milices sécuritaires qui affrêtent un navire pour refouler les embarcations surchargées de migrants, ou traquer le clandestin…comme on le voit aujourd’hui à nos frontières régionales…et même les habitants généreux qui leur tendent la main !

“Les Français d’abord”…c’est juste le contraire de la planète et l’humain d’abord !

Un peu d’internationalisme éloigne de la patrie, beaucoup y ramène” disait Jaurès

René Fredon

Marine Le Pen se réclame du…gaullisme ?!