Lors d’une intervention le 25 mars, le chef de l’Etat a déclaré qu’il ne dressait “aucun constat d’échec” face à la gestion de la crise sanitaire en France ! “Je peux vous affirmer que je n’ai aucun mea culpa à faire, aucun remord, aucun constat d’échec“, a-t-il insisté, alors que les critiques se multiplient face à une forte dégradation de la situation sanitaire en France. Tout va bien ou presque !

Difficile de faire mieux dans un pays qui compte à ce jour 94 275 morts, chiffre qui a doublé depuis la fin novembre ! La France se situe au  8è rang mondial pour une telle “performance” et au 6è pour le nombre de contaminés. Il n’y a pas à dire… il gère, il a tout prévu, rien ne saurait lui échapper. En tout cas il décide et le fait savoir.

Ces semaines qui viennent seront difficiles, nous prendrons toutes les mesures utiles en temps et en heure et il n’y a à mes yeux aucun tabou”, a prédit notre Nostradamus, après un Conseil européen en visioconférence.

Il cherche à donner l’impression de maîtriser une pandémie qu’il n’arrive pas à rattraper ! Il faut une haute dose de…suffisance pour tenir de tels propos. Il veut que s’accélèrent les vaccinations alors qu’il n’a aucune prise sur la livraison défaillante des vaccins nécessaires, ce qui retarde évidemment les effets attendus sur la contamination et la mortalité qui explosent en zone rouge augmentée de trois nouveaux départements.

Un échec patent de sa stratégie et de sa politique de santé

Mais il donne des leçons à l’Europe (1) dont il se prend pour le leader auto-désigné, la chancelière allemande s’apprêtant à passer la main. Il envoie son ministre des affaires étrangères tancer Moscou et Pékin qui feraient de “la propagande” avec leurs vaccins toujours pas validés par l’agence européenne, ce qui n’est pas le fait du hasard.

Il ne lui vient pas à l’idée de reconnaître que la Chine, quoiqu’on en pense, a su résoudre le problème sanitaire et humanitaire d’une pandémie partie de chez elle. Du coup elle a aussi réussi à limiter les conséquences économiques et sociales, sa croissance restant positive entre +6 à +8%. On ne peut pas en dire autant, le monde déplorant par ailleurs 2,7 millions de morts et 125,5 millions de cas recensés depuis le début.

L’UE préfère, pour des raisons idéologiques, ne rien devoir à ces pays, ennemis déclarés d’un occident dépassé, qui relance la “guerre froide” en plus de la guerre sanitaire tandis que les virus poursuivent leur progression mortifère.

C’est tellement mieux de faire la guerre sanitaire et économique  en spéculant sur les vaccins et les brevets tout en se servant d’abord et en ignorant les pays pauvres livrés à dose homéopathique !

Tu ne produis rien, tu attendras...tu n’as même pas de quoi payer” Elle est pas belle la solidarité internationale ? Et la mentalité de ces dirigeants libéraux plus nationalistes les uns que les autres : on vit dans un monde “formidable”. C’est dans l’adversité qu’on s’en rend le mieux compte…si on ne se laisse pas bercer et berner pas le rouleau compresseur des médias bienveillants.

Et c’est comme ça depuis le début. Le discours est le même : “il faut toujours attendre pour évaluer l’efficacité des restrictions en vigueur pour un éventuel durcissement“dixit Véran qui parle : “de l’acceptabilité” des mesures pour les Français épuisés de lutter sans relâche depuis un an”. Ah! le moral des Français, ils n’arrêtent pas d’en prendre la température, pour vérifier au jour le jour surtout si ça affecte leurs intentions de vote !

Ce que relaie immédiatement Santé publique France et les médias bien pensants :”On observe une probable lassitude des Français face aux mesures de distanciation sociale”. Il y a de quoi.

La mortalité a doublé en quatre mois

Cela fait 14 mois que l’on subit des vagues de contaminations et que le gouvernement semble les sous-estimer tandis que des scientifiques du conseil de défense suggèrent qu’il faudrait prendre des dispositions plus contraignantes sur un temps limité plutôt que de promettre des demi-mesures, ce qui permet au virus et à ses variants de continuer à se répandre ! Et les Français.es n’en voient pas la fin.

C’est ce qui se passe et l’on voudrait nous faire croire que, au stade où nous en sommes,en différant de nouvelles contraintes inévitables -dont tout le monde se passerait-, on réduit le rythme des contaminations et de la mortalité ?? C’est se moquer du monde.

Une quarantaine de directeurs médicaux de crise de l’AP-HP (3) disent se préparer à devoir “faire un tri des patients” pour faire face à la troisième vague de Covid-19 qui submerge les hôpitaux parisiens. Il y a quelques jours Macron leur demandait de différer 80% des interventions hors covid ! Tout ça par manque de lits et de personnels ! Inadmissible.

Quelle preuve d’échec du grand commandeur que cette incapacité à prendre la main sur la pandémie. Ce qui allonge du même coup, sa durée et ses conséquences désastreuses en vies humaines sacrifiées sur l’autel de l’austérité.

De ça, oui, les Français en ont marre et le font savoir. D’autant que s’y ajoute le gros problème de la vaccination partie, chez nous, au ralenti, faute de vaccin national ou européen. D’où de sérieux retards de production et de livraison. Macron peut toujours faire des effets de manche, il ne maîtrise pas davantage ce volet, on ne le sait que trop.

Et pourtant, le 21 novembre 2020, au sommet du G 20 (2) il en avait eu de bonnes intentions : “parmi les leçons que nous pouvons tirer du moment que nous vivons, la plus grande est sans doute que nous partageons, plus que jamais, au Nord et au Sud, un avenir et des défis communs. Et qu’il faut donc partager aussi, les solutions. Nous devons renforcer, partout sur la planète, les systèmes de santé, partout partager les ressources qui sont les nôtres, partout continuer à former, former des personnels de santé, pour que notre riposte sanitaire puisse être à la hauteur des défis…” Il agit diamétralement en sens inverse.

Le G 20 représente 90% de l’économie mondiale, il fallait bien rassurer l’opinion sur “l’altruisme” bien connu qu’il incarne ? Son discours était un sommet…d’hypocrisie et de démagogie. A cette date 56,8 millions de contaminés et 1,36 millions de morts avaient été recensés. Quatre mois après ces chiffres ont doublé !!

Pour se dédouaner, il a épinglé AstraZeneca qui avait promis de livrer 120 millions de doses à la France et qui n’en a livré que…30. On ne sait pas ce que devient Johnson et Johnson ? Ni où en sont les vaccins français et européens. Chaque pays fait ce qu’il veut tout en parlant de coordination nécessaire…à défaut de solidarité internationale.

Macron feint de découvrir que les grands labos privés ne tiennent pas toujours leurs promesses et que de grands Etats comme les E-U et l’Angleterre “sont allés plus vite que nous et ils ont eu raison…” Il voudrait bien en faire autant et déplore que l’Europe n’ait pas assez le goût du risque, dit-il, c’est-à-dire qu’elle n’ait pas assez investi dans la recherche pour produire ses propres vaccins. On ne le lui fait pas dire mais pour produire sous statut privé, cela va de soi.

La partie non rentable ce sont les Etats à travers les contribuables qui l’assument. La partie industrielle est laissée au privé qui engrange les profits dans ce secteur hautement rentable.

Les gestions libérales n’ont pas la vocation de produire des vaccins et brevets pour en faire des “biens communs”, ni de se départir de leur pouvoir de décision sur l’économie privée  qui constitue leur finalité et qu’ils entendent développer au détriment des services

publics. C’est notamment le cas de la santé. On en voit les conséquences directes même si les tenants du capitalisme n’ont pas attendu la pandémie pour imposer la dictature de la finance dont on subit les terribles conséquences en matière sociale et écologique et dans tous les domaines de la vie. Ce sont les hôpitaux publics qu’il faut soigner..et en urgence. (4)

Il n’y a pas de solution miracle. Il importe de pallier la carence organisée et de concevoir, produire et utiliser des vaccins en France et en Europe mais aussi accessibles à tous les habitants de la planète. En même temps que prendre des dispositions cohérentes et ciblées pour réduire drastiquement la circulation des virus et la durée des contraintes de plus en plus insupportables.

La réponse la plus pertinente, me semble-t-il, c’est de s’emparer des votes à venir pour sanctionner et en finir avec les politiques d’austérité successives qui ont produit ces résultats catastrophiques. Il n’y a aucuune fatalité. Ne les laissons pas au pouvoir.

Comme le dit cette pancarte d’un ou une étudiant.e des beaux-arts occupant le Théâtre Liberté sur la place du même nom : “Notre vie ne doit pas être une tragédie” !

 

René Fredon

 

(1)

https://actu.orange.fr/politique/vaccins-anti-covid-emmanuel-macron-prone-la-fin-de-la-naivete-europeenne-magic-CNT000001y5cYL.html

(2)

https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2020/11/21/intervention-du-president-emmanuel-macron-sur-la-riposte-sanitaire-et-la-preparation-aux-futures-pandemies-au-sommet-du-g20

(3)

https://actu.orange.fr/france/coronavirus/les-directeurs-de-crise-de-l-ap-hp-previennent-qu-ils-vont-devoir-trier-les-patients-CNT000001ybhuP/photos/un-patient-malade-du-covid-sous-assistance-respiratoire-a-l-hopital-cochin-le-18-mars-2021-9f1b4dae85ca9aaa77007c8cc80adf06.html

(4) Un livre salutaire d’un Hyérois, économiste et journaliste à l’Humanité : Pierre Ivorra qui vient de publier son livre : “Sauver l’hôpital…des remèdes pour sauver le système de santé”

Disponible aux éditions Eyrolles (17,90 euros) et dans les librairies…ouvertes.

L’arrogance de Macron ne passe pas.;