La veille, Macron n’avait pas de mots assez durs pour qualifier le spectacle pitoyable des négociations pour désigner les quatre postes clés de la nouvelle institution qui découle du vote du 26 mai renouvelant le parlement européen. Le lendemain il est donné comme le grand gagnant !
Les chefs d’Etat et de gouvernements des 28 Etats membres ont fini par s’entendre sur les candidats à ces postes qui devront ête ratifiés par le nouveau parlement à la mi-juillet.
A l’issue d’un marathon qui a révélé les basses manoeuvres en coulisses et “l’estime” que se portent les uns et les autres, la présidence de la commission européenne a été confiée à l’allemande Ursula von der Leyen (CDU-PPE), celle du conseil européen par le belge Charles Michel (Centre-droit-ADLE), la BCE sera présidée par la française Christine Lagarde, qui présidait le FMI et fut ministre des finances de Sarkozy, enfin, le Haut représentant de l’UE aux affaires étrangères est confié à l’espagnol Josep Borrell (PSOE).
Le parlement européen a élu le social-démocrate italien David Sassoli ? Aucun candidat du PPE, groupe majoritaire ne s’était présenté.
S’il y a bien quelque chose qui ne passionne pas les Français, c’est cette tambouille politicienne qui s’exposee aussi stérile que les majorités précédentes tout aussi libérales.
Macron tire la couverture à lui, et alors ? La tête de l’UE ne change pas. Comme avant, elle est toujours entre les mains de représentants des fondateurs de cette Europe du capital drivée par sa puissance dominante, l’Allemagne.
Comment faire oublier le bilan ? Le brexit, la crise des migrants, la soumission à l’OTAN et la perte d’influence géo-politique, le mutisme face à l’agitation périlleuse deTrump, les objectifs écologiques à la traîne, les conditions sociales aggravées, l’agriculture et l’industrie en perte de vitesse, comme la croissance. Des progrès, oui il y en a : les dividendes des gros actionnaires explosent ainsi que les cadeaux faits aux riches ! La dette aussi.
Et ça continue. Le gouvernement français vient de ratifier le CETA (accord avec le Canada qui supprime 98% des droits de douane). Cet accord fonctionne depuis un an, après avoir été adopté par le parlement européen mais sans avoir été ratifié par les parlements nationaux (prévu le 17 juillet en France) ! Idem avec le Mercosur (Brésil, Argentine, Paraguay, Uruguay… le Vénézuéla en a été exclu en août 2017). Les deux accords soulèvent un tollé de protestations en France et en Europe.
La concurrence “libre et non fausée” (?) ne passe pas. Même dans les rangs de LREM s’expriment des opinions très critiques et assumées. Mais le rouleau compresseur de la grande finance et ses thuriféraires n’en ont cure.
Pas de quoi resserrer le lien entre les institutions et les citoyens. Ni tarir la source des progrès de l’extrême-droite partout en Europe qui propose le repli nationaliste identitaire comme solution à nos problèmes. Un danger mortel pour ce qui nous reste de démocratie.
Seule vraie satisfaction : le sursaut du vote écologique mettant en cause nos modes de production et les choix politiques qui, aujourd’hui, tournent le dos aux exigences de la situation et des accords internationaux. Ils appellent des résultats et pas seulement des engagements plus ou moins démagogiques, assortis de dérogations et de délais renforçant les conséquences du productivisme induit par les intérêts des financiers.
Tout le monde est écologiste, aujourd’hui. Même ceux qui ne veulent rien perdre de leurs privilèges et qui sont prêts à vous acheter une petite cuillère pour nettoyer nos plages polluées par ceux qui les fréquentent et qui n’ont pas de savoir-vivre !
Dès que vous leur parler d’utilisation de pesticides dangereux à grande échelle, d’engrais-miracles, d’en finir avec les énergies fossiles, les plastiques, la déforestation, les gaz à effet des serre…etc, ils ont tout leur temps. Mais si vous leur parler des normes sociales et environnementales à respecter partout et par tous, alors là, ils changent de couleur. Mais ils n’ont rien contre l’interdiction des pailles en plastique.
Ils tiennent à “leur” système par dessus tout. Voyez Macron comme il se démène pour réduire nos impôts (surtout ceux des riches) en nous faisant miroîter la compétitivité de nos entreprises et en tapant dans la poche des plus pauvres. Après avoir reconnu que la baisse des APL avait été une erreur, il remet ça en annonçant qu’il y a 1 milliard d’euros à récupérer…chez les plus fragiles !
Décidément, leur mondialisation s’est très bien ouverte aux marchandises et aux capitaux mais pas aux hommes, enfin si…aux hommes d’affaires ! Le compte n’y est vraiment pas.
Quand, après Cahuzac, Fillon, Dassault, Balkany, Sarkozy…pour ne citer que les plus récents aristocrates de la politique, en délicatesse avec la justice pour conflits d’intérêts ou blanchiement de fraude fiscale, on vous apprend que ce brave Raymond Barre, ancien 1er ministre, “meilleur économiste de France“, selon Giscard, toujours prompt à s’assoupir, avait un bon matelas en Suisse de 11 millions (7 millions d’euros), il y a de quoi devenir plus que sceptique sur la capacité d’un pouvoir qui leur ressemble, inapte à rétablir plus d’égalité, de liberté et de fraternité entre ceux qui possèdent et ceux que l’on dépossède.
L’issue, à très court terme, n’est pas vraiment perceptible. Elle n’en existe pas moins.
Les municipales peuvent constituer la première étape de la convergence des forces progressistes, sociales et écologistes…si les citoyens s’en mêlent. A nous de choisir.
René Fredon