Edouard Philippe s’est livré à un exercice difficile : détailler le plan de déconfinement décidé par le président de la République pour le 11 Mai. Quitte à y renoncer si les indicateurs sanitaires signalaient un “retour de flamme”.

Le 1er ministre s’est donc employé, avec une grande prudence et une certaine humilité de ton, à nous convaincre que l’échéance fixée par Macron peut encore évoluer. Signe que les violons ne sont pas très bien accordés avec l’Elysée.

Le 1er ministre a mis quelques bémols à la partition qui lui avait été remise, concédant à une majorité de Français.es que le déconfinement sera conditionnné par les garanties sanitaires obtenues d’ici là, si elles se confirment dans les jours à venir. Et sur la base du volontariat on passera à une reprise très progressive et différenciée selon les départements, plus ou moins touchés par la pandémie et sans relâcher la vigilance au quotidien notamment face au risque d’une 2ème vague dûe à la promiscuité rétablie, dans les entreprises, les transports collectifs, les écoles…

 C’est d’ailleurs pour cela que le comité scientifique avait émis, le 20 avril, un avis collectif, qui proposait “de maintenir les crèches, les écoles, les collèges, les lycées et les universités fermés jusqu’en septembre” prenant acte de la décision relèvant du seul choix politique de l’éxécutif, avec voix prépondérante du président,  sous la pression directe d’un patronat pressé d’obtenir quelques concessions et beaucoup d’aides publiques moyennant quelques risques sanitaires qui retomberont sur les salariés et les contribuables.

Le gouvernement a perdu beaucoup de crédibilité par ses déclarations contradictoires, parfois mensongères à propos de sa minoration de l’épidémie à ses débuts, à propos des masques “qui ne servaient à rien” (quand il n’y en avait pas !), des tests, des matériels de réa, des blouses, du gel…sans parler des lits et des personnels soignants manquant tragiquement.

  1. Philippe savait que l’annonce de la réouverture des écoles maternelles et primaires, un 11 mai, n’était pas très bien comprise et donnait l’impression qu’elle était plus dictée par la volonté de faire repartir l’activité économique que par des considérations sociales et pédagogiques.

Il a donc appuyé sur le fait que si le feu vert est donné pour le 11 mai, il fera confiance aux directeurs d’écoles, aux personnels, aux parents et aux élus locaux pour adapter dans chaque département (et plus région) le dispositif prévu.

Rappelant que “nous devrons vivre avec le virus, nous sommes loin de l’immunité de groupe…” Nous n’avons pas encore de traitement, ni de vaccin -la recherche avance- l’hypothèse d’éradiquer le virus reste incertaine et le danger toujours présent. Le risque est sérieux d’une 2è vague dans ces conditions. La circulation du virus n’étant pas homogène sur tout le territoire, il compte s’appuyer davantage sur le couple maires-préfets.

Protéger, tester, isoler

Telle est la stratégie à trois axes qu’il a déclinée avec l’accent mis sur la priorité absolue d’éviter la contamination d’où l’extrême difficulté à “ouvrir les portes” et à réduire la circulation du virus. On pense de suite aux tranports publics (train, bus, métro, transports scolaires…avions, bâteaux) : ça paraît mission très difficile sinon impossible.

Si bien qu’il y aura de fortes restrictions et contraintes. Pas question de profiter des w-e pour se retrouver en famille ou aller sur nos plages…Mais commerces, café-restaurants, marchés pourront réouvrir le 11 mai sauf avis contraire des maires en accord avec les préfets.

On attendra pour aller dans les lieux publics et dans la pleine nature, selon qu’on sera dans une commune verte ou rouge, on sera plus ou moins contraint. Rien en vue pour les stades, les spectacles, les musées, les lieux à grand public…On pourra néanmoins sortir à moins de 100 km de son domicile sans attestation.

Les gestes-barrières restent déterminants, le port du masque obligatoire dans certaines situations et en fonction du service rendu (coiffeurs, esthéticiennes, petits commerçants pourront l’exiger).

  1. Philippe a annoncé qu’on recevait 100 millions de masques “grand public” par semaine à la disposition des collectivités locales, l’Etat prenant 50% du coût à sa charge, incitant les entreprises à assurer ses propres besoins et les particuliers à se les confectionner. Etat et régions aidant aussi les “indépendants”, sans plus de précision.

Il nous a été rapporté que plusieurs pharmacies n’en disposaient pas à la vente, du côté du Pont-du-Las, une autre en a reçu un stock…périmé ! Les prix de vente -non remboursés- sont assez divers et peuvent aller au-delà de 10 euros, selon la catégorie et la qualité. Même s’ils sont lavables, il faut en changer relativement souvent. C’est une dépense dérisoire…pour beaucoup mais pas pour tous, loin s’en faut : encore une barrière à franchir et pas la moindre.

Tous les groupes d’opposition ont notamment insisté sur la gratuité à assurer puisque l’Etat doit veiller à l’égalité de traitement. Les CCAS ont été cités pour aider les familles en difficultés. A vérifier. De toutes façons, c’est toujours nos impôts.

Quant aux tests, le nombre de 700 000 par semaine a été avancé, au-dessus de l’objectif qui n’est pas de tester tout le monde mais les cas susceptibles d’avoir été contaminés pour le vérifier et remonter la filière des personnes cotoyées susceptibles d’en être la cause, pour pouvoir les isoler à domicile ou dans un hôtel réquisitionné.

Phase décisive qui a amené le 1er ministre à s’engager à faire un vote sur un outil numérique qui fait problème, le “stop covid”. Après un débat spécifique. Ce qui tend à prouver qu’il y a bien incertitude sur le respect de la confidentialité des données recueillies.

Le 1er ministre  indiqué que le gouvernement sera amené à faire voter des dispositions légilatives, notamment pour proroger l’état d’urgence, de manière à “protéger les Français sans immobiliser la France”après avoir brocardé les députés qui commentent les votes majoritaires plutôt que de chercher à améliorer les propositions de loi !

Encore faudrait-il que débat réel il y ait et que la domination parlementaire du parti de Macron ne soit pas confondue avec le reflet fidèle de ce que représente l’exécutif. Il est l’illustration d’un déficit colossal de démocratie, à commencer par le sommet de l’Etat, qui, par exemple n’a jamais eu le courage de soumettre son projet de “contre-réforme” des retraites, dont on ne sait plus ce qu’il devient, à un référendum national.

 

René Fredon

Le vote

 

368 votes ont approuvé le plan d’action du gouvernement (LREM+MODEM….)

 

100 ont voté contre (GDR, LFI…des socialistes

 

103 Abstentions essentiellement LR

11 Mai  Déconfinement… Peut-être…si ?