TotalEnergies sort du pétrole russe mais pas du gaz !

                        Il engrange des profits-record

 

Très impliqué dans les hydrocarbures russes depuis 30 ans le géant mondial énergéticien

TotalEnergies vient de signer le 26 août 2022 la vente de ses actifs à Novatek dans le groupe pétro-gazier russe Terneftegaz dont il détenait 49% des parts.

 

Sauf que le groupe français s’il renonce au pétrole russe, il ne renonce pas au gaz ! Et il reste très lié à son partenaire russe dont il détient toujours 19,4 % du capital, avec lequel ils avaient formé Terneftegaz…Cet accord lui garantit le recouvrement des capitaux investis.

 

A part ça, la face serait sauvée ? Greenpace a immédiatement réagi et considère qu’il doit retirer ses parts car elles servent bel et bien à ravitailler l’armée russe.

 

C’est sur ce terrain que Macron était intervenu pour que toutes les entreprises françaises se retirent de Russie, ce qui est loin d’être réalisé, ne serait-ce que parce que la France et l’Europe, notamment l’Allemagne, ne peuvent pas se passer du gaz russe du jour au lendemain.

 

D’autres entreprises françaises sont toujours en Russie, dont Auchan, Vinci, Véolia, Leroy-Merlin, La Redoute, Lacoste…estimant qu’elles n’ont aucun rapport avec le financement de la guerre puisqu’elles gèrent des services utiles à la population russe et “donnent” du travail à des milliers de salariés. Certaines ont suspendu les investissements prévus sans fermer boutique.

 

L’UE a cru que le boycott total des échanges avec la Russie était une décision populaire, vertueuse et efficace. Elle a foncé pour aider l’Ukraine et s’engager avec l’OTAN et les E-U à ses côtés pour isoler la Russie. Plutôt que d’affirmer l’urgence d’une paix négociée pour stopper l’escalade mortifère qui oppresse le monde entier.

 

L’UE, devant le risque de pénurie de gaz cet hiver, envisage dans cette hypothèse, de réduire de 15% la consommation dans les 28 pays. La Hongrie s’y est opposéee. L’UE espère changer de fournisseurs en refusant le gaz russe qui circulera encore. Sanction qui ne résoudra rien sur le plan économique et politique mais fera exploser les prix et les marges des spéculateurs. Les consommateurs seront encore plus pénalisés. Et ce sera la faute aux Russes.

 

La visite de Macron en Algérie ces derniers jours avait une forte odeur…de gaz bien que ce  n’était pas à l’ordre du jour. Dès le lendemain, la presse nationale ne parlait plus que de ça : les livraisons de l’Algérie à la France devraient augmenter de 50%. L’économie n’est jamais bien loin.

 

TotalEnergies maintient donc sa présence dans l’exploitation du gaz russe et dit avoir répondu aux exigences du gouvernement en effectuant un retrait très relatif du pétrole sans toutefois se retirer du gaz, ce qui n’est pas un retrait…total !

 

Un énorme champ d’activités

 

Le géant énergéticien mondial est passé, le 29 mai 2020, du statut de société anonyme à celui de “Société européenne” avec un capital de 6,47 Mds réparti en 2,61 Mds d’actions de 2,50 euros chacune.

 

Son objet est très vaste, qui va de “toutes les activités relatives à la production et à la distribution de toutes formes d’énergies” en passant par “la recherche et l’exploitation des gisements miniers et notamment d’hydrocarbures sous toutes leurs formes…” mais aussi de “toutes les activités de la chimie sous toutes ses formes” incluant le caoutchouc et sans oublier “toutes opérations financières, commerciales, industrielles, mobilières et immobilières, toutes prises d’intérêts ou de participations, sous quelque forme que ce soit, dans toute entreprise ou société existante ou à créer pouvant se rattacher directement ou indirectement à l’objet ci-dessus ou à tous objets similaires ou connexes, de nature à favoriser son extension ou son développement”.

 

Un champ d’activités énorme et des actionnaires institutionnels très  majoritaires qui détiennent 78,5% du capital ainsi réparti : France 15,1%, Royaume-uni, 10,9%, reste de l’Europe, 17,1%, Amérique du Nord, 30%, reste du monde, 5,4%.

 

L’UE y est minoritaire, les 1,3 millions d’actionnaires individuels -dont la moitié aux E-U- ne représentent que 13,4% du capital. A noter que la société américaine BlackRock leader mondial de la gestion d’actifs détient 162,58 millions d’actions de TotalEnergies soit 6,2% du capital.

 

Inutile de dire que la notion de rentabilité des capitaux investis y est le critère  principal qui ne va pas se laisser démonter par les investissements à consacrer à l’urgence climatique ainsi qu’au relèvement des salaires qui réduiraient les profits.

 

Des profits insolents

 

Que pèse un gouvernement devant un tel mastodonte ? Surtout quand il est à leur service et que les multinationales étalent leurs profits-record au moment où ce même pouvoir prépare le peuple à réduire sa consommation d’eau potable, d’électricité, de gaz et d’énergies de toutes sortes dont les prix explosent.

 

Total annonçait, fin juillet, avoir réalisé 17,7 Mds d’euros de profits…au 1er semestre, près de 3 fois plus qu’au 1er semestre 2021 ! Et il n’a pas payé d’impôt sur les sociétés en 2020 et en 2021 ?!  s’indigne l’économiste Maxime Combes dans Basta du 28 juillet.

 

Macron a pu compter sur la droite pour rejeter la taxe sur les superprofits. Ceux de Total proviennent de la pénurie des énergies et pas qu’à cause de la guerre en Ukraine qui enrichissent les pétroliers-gaziers par la flambée de leur prix  atteignant des sommets qui vont paupériser un peu plus les catégories les plus défavorisées.

 

Il faut être d’un cynisme méprisant pour faire porter le poids de la dérive austéritaire permanente des néo-libéraux sur tout un peuple ainsi que sur des entreprises, petites et moyennes qui ne peuvent supporter de telles augmentations, poussées à mettre la clé sous la porte pour les plus fragiles, d’autant que le crédit, lui aussi, coûte plus cher.

 

Ne plus pouvoir payer ses factures d’énergies, tout en craignant le rationnement, est devenu la hantise de tout un chacun…ou presque.

 

Or,”maintenir la rentabilité des grandes entreprises, c’est leur seule boussole.”..analyse l’économiste communiste Denis Durand, dans l’Huma du 31-8. “La stratégie du gouvernement consiste à limiter les effets de l’inflation en incitant les entreprises à distribuer des primes , sans jamais  heurter le patronat…” hostile aux augmentations de salaires comme vient de le rappeler le “patron” du MEDEF devant la Première ministre restée muette !

 

Denis Durand résume ainsi les propositions du PCF : “d’abord porter le SMIC à 1900 euros brut et imposer des hausses de salaires dans toutes les entreprises, s’il le faut leur couper le robinet des aides publiques. Agir sur la formation des prix au sein des entreprises. Ce qui exige de donner davantage de pouvoirs aux salariés…mettre en place des conférences régionales, locales et nationales sur l’emploi et la formations ouvertes à tous les acteurs de l’économie..

 

Jeter les bases d’une nouvelle forme de planification beaucoup plus souple et décentralisée…et s’attaquer à l’inflation financière avec un pôle public bancaire pour réorienter le crédit fondé sur des critères sociaux et écologiques que devront respecter les entreprises en cessant de délocaliser…”

 

Une vision que ne partagera pas le conseil d’administration de TotalEnergies tel qu’il existe mais qui pourrait facilement convaincre les salariés.es de toutes les entreprises de faire advenir, par leurs luttes, de telles avancées de civilisation

 

 

René Fredon

 

https://www.lamarseillaise.fr/france/les-prix-du-carburant-un-enjeu-presidentiel-HI10188528

 

TotalEnergies sort du pétrole russe mais pas du gaz ! Il engrange des profits-record