Il était attendu à Toulon et à La Seyne ce vendredi 5 octobre. Gérard Collomb ne sera pas au rendez-vous. Il a quitté ses fonctions de ministre de l’intérieur, dans une précipation qui rappelle celle de Nicolas Hulot et qui en dit long sur l’ambiance qui règne au sommet de l’Etat.

Lui, le “marcheur” de la première heure qui était aux avant-postes pour promouvoir la candidature de Macron et entraîner une grande fraction du parti socialiste et de son électorat dans l’irrésistible ascension du prodige de l’Elysée dont il paraissait si proche, murmurant à l’oreille du président, si protecteur, si fier d’avoir accompagné son jeune poulain, incarnation d’un “nouveau monde”.

Il est vrai que Macron, lui aussi, avait quitté sur-le-champ le ministère de l’économie et, après 16 mois d’expérience, l’impopularité du chef de l’Etat ne cesse de s’affirmer, sa majorité se fissure sous l’effet de la perception de sa politique qui s’attaque aux plus modestes pour donner aux plus riches et qui détricote tout de ce qu’a pu réprésenter le modèle social français.

Collomb, qui avait la police, la gendarmerie, les préfets directement sous ses ordres pour assurer la sécurité, le renseignement et…les élections, a choisi de retrouver son siège de maire de Lyon plutôt que d’être le troisième dans la hiérarchie du pouvoir central.

Il n’entendra plus les plaisanteries peu agréables du sérail sur son âge et son côté rétro et il était bien placé pour connaître les difficultés d’implantation de LREM dans les territoires comme les tendances de l’opinnion à la veille de deux élections à hauts risques, les européennes et les municipales.

On retient les petites phrases “le manque d’humilité…” du gouvernement, allusion de Collomb à la cantonade, mal pris par Macron, tout comme la gestion de l’affaire Benalla par-dessus le ministre de l’intérieur…l’omnipotence de Macron. Mais ne perdons pas de vue le fond de sa politique très libérale et largement partagée par son gouvernement et sa majorité, pas dans les profondeurs du peuple qui vit le contraire de ce qu’on lui promet.

Ce n’est jamais le système économique, le capitalisme et leur programme qui en découle qui sont interrogés, c’est seulement la manière de le mettre en oeuvre. Comme s’il était immuable et n’avait rien à voir avec les maux de nos sociétés ? Il s’agirait simplement de le gérer comme une entreprise, “comme une start-up”, précise Macron, c’est cela le “nouveau monde” du fric et des affaires en même temps que du numérique et de l’intelligence artificielle à des fins mercantiles.

Au contraire Macron ira jusqu’au bout, il trouve qu’il ne va pas assez vite. Mais le peloton des marcheurs ne suit plus, il a des doutes et…il a l’oeil sur l’écran des sondages et les échos du terrain. Le sommet de l’Etat ne fédère plus, il désagrège.

Il n’y avait qu’ à voir la tête du Premier ministre qu’attendait Collomb place Beauvau et l’hommage glacial qu’il a rendu à son aîné en quelques dix secondes ! Et ils osent dire qu’il n’y a pas de crise, que tout est sous contrôle au sommet de l’Etat ?

Bayrou à la justice, Hulot à l’environnement, Flessel aux sports et maintenant Collomb à l’intérieur…quatre démissions ! Et les 40 voix qui ont fait défaut à Ferrand dans son groupe pour atteindre le perchoir ?

Simples questions de personnes, de caractères, d’hybris ? Ou réelle crise de légitimité d’un pouvoir trop solitaire qui se délite sous le poids des désillusions qu’il a déjà créees ? Et dont le programme austéritaire n’a jamais entraîné une adhésion majoritaire dès l’origine.

Demain la situation politique ne sera plus la même mais le même pouvoir sera toujours là. Ce n’est pas d’un changement d’hommes -ou de femmes- acquis au libéralisme dont le pays a besoin, mais d’un changement de cap qui nous sorte de l’ornière inégalitaire dans laquelle nous nous enfonçons, en France et en Europe. Et des retards qui s’accumulent en matière de transition écologique.

Car des richesses et de l’argent, il y en a mais pas pour tout le monde.

 

René Fredon

 

 

 

 

 

 

Tempête au sommet de l’Etat !

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