Sanary : condamné en appel le maire démissionne…enfin !

Maire UDF puis UMP depuis 1989 Ferdinand Bernhard aura tenu 32 ans et 5 mandatures avant
d’être démis de ses fonctions après sa lourde condamnation en appel : 3 ans de prison dont un
ferme et 5 ans d’inéligibilité. Cela pour prise illégale d’intérêt concernant un projet immobilier
personnel entre autres.
Son recours en cassation ne met pas en cause l’exécution immédiate du jugement d’appel et le
retrait de toutes ses fonctions électives. Il était également président de la communauté
d’agglomération Sud-Sainte Baume.

L’exécution de la prison ferme se fera…à domicile sous surveillance électronique. Ce qui relève d’un privilège dont ne bénéficient pas nombre de coupables de faits délictueux comparables,
d’autant que les ennuis judiciaires de cet admirateur d’Arreckx, ont commencé très tôt.
En 1983, à 31 ans Ferdinand Berhnard fut élu 1er adjoint du maire d’Ollioules et, deux ans plus
tard, conseiller général du canton d’Ollioules puis président du comité départemental du tourisme
en 1988, juste avant d’être propulsé maire de Sanary. Sa carrière d’élu à perpétuité commençait.

Tant pis si les frasques du maire éloignaient d’année en année les électrices.eurs des urnes comme
ce fut le cas en 2020 avec une abstention de 70%, ce qui rend sa “victoire” au 1er tour -avec
68,71% des exprimés et 3 169 voix- très relative car elle ne représente que…20% des inscrits !
Même si le contexte général est à une abstention inédite, à Sanary c’est surtout dans l’électorat de
droite très dominant qu’elle atteint des sommets.

A l’élection précédente de 2014, le maire sortant faisait 4 248 voix au 1er tour et 4 969 au second.
A la présidentielle de 2007, Sarkozy faisait 8 895 voix et 73,23% avec une faible abstention de
15%.

Les ennuis judiciaires du jeune et ambitieux maire avaient commencé très tôt et ne concernaient
pas que l’affaire immobilière incluant sa propre villa, qualifiée de “prise illégale d’intérêts” tout
comme le détournement de fonds publics au profit d’une ancienne très proche collaboratrice de
son cabinet promue directrice générale des services sans droits ni titres. Favoritisme encore à
travers l’attribution d’un marché public de conseil et d’un autre pour des prestations de rédaction
du bulletin municipal. Ajoutons-y un détournement d’argent public pour l’utilisation d’un véhicule
de fonction et d’une carte d’autoroute.

Tout cela courait à travers la ville depuis longtemps ainsi que les méthodes très arbitraires
reprochées au maire qui n’hésitait pas à “placarder” celles et ceux qui ne lui faisaient pas
allégeance tout en connaissant fort bien leur métier. Il confondait allégrement “être au service de
la population” et “être au service du maire”même quand il dérape…

Il n’est hélas ni le premier, ni le seul responsable politique à s’attribuer des pouvoirs
discrétionnaires et à veiller particulièrement au recrutement séléctif, base du clientélisme,
d’agents publics qui se sentiront plus ou moins redevables au maire d’avoir été recrutés.
Mais pour en rester au Var -qui bascula à droite quand la France se tourna vers la gauche- et à ses
maires responsables politiques départementaux, voire nationaux on a eu droit aux liaisons
dangereuses, à la corruption et à l’arbitraire, à commencer par celui qui se flattait d’être le “parrain
du Var”, Maurice Arreckx, Maire UDF de Toulon et président du conseil général, prédécesseur etmentor d’Hubert Falco qui fut son 1er vice-président.

Il aimait tellement le Var qu’il a fini ses jours aux Baumettes. Et Toulon se donna au FN le temps d’une mandature.
Son successeur, beaucoup plus prudent, est néanmoins entendu dans une enquête préliminaire –
ainsi que le président du conseil départemental Marc Giraud- pour détournement de fonds publics
à travers un privilège qu’il s’était octroyé en tant qu’ancien président : il dispose à sa discrétion
d’un frigo garni aux frais du département.

La procédure suit son cours et l’on ne peut préjuger de rien. Il n’empêche que l’on a du mal à
concevoir qu’un ancien président qui ne baigne pas dans l’indigence puisse justifier une telle
pratique même si le préjudice financier reste limité selon la ligne de justification des intéressés, à
défaut de nier les faits.

Au sommet toujours, on rappellera qu’à Fréjus, le maire de 1977 à 1997et ancien ministre de la
culture puis de la défense, François Léotard président du PR puis de l’UDFqui faisait alors partie
des présidentiables, a mis fin à sa carrière politique au début des années 2 000 après 20 ans à la
tête de la commune.

Et après beaucoup d’ennuis et de condamnations pour financement illicite de parti politique et
blanchiment d’argent. Il sera même condamné en 2021 à deux ans de prison avec sursis dans le
volet financier de l’affaire Karachi, véritable affaire d’Etat autour de deux contrats d’armement

signé en 1994 avec un attentat en 2002 qui fit 14 morts dont 11 salariés de la DCN et des rétro-
commissions pour la campagne de Balladur !

Comme maire de Fréjus sa probité en aura pris un coup, notamment à cause d’un gros projet
immobilier, celui de Port-Fréjus entâché de quelques scandales dont celui de sa somptueuse
gentilhommière acquise à des conditions très avantageuses grâce au promoteur de l’opération. Et
Fréjus se donna un maire FN puis RN en 2014.

On pourrait également rappeler les meurtres politiques qui se sont produits dans le Var ces trente
dernières années sans qu’ils aient tous été élucidés.

Lorsqu’un ex-chef d’Etat est jugé coupable de fraudes 15 ans après et condamné à de la prison
ferme (à domicile) et que le bureau de l’actuel ministre de la justice est persquisitionné, on est en
droit de se demander si la parole publique est respectable et plus encore, douter que les critères
libéraux en oeuvre dans notre pays et dans le monde puissent réduire les inégalités sociales et les
émissions de CO2 quand on découvre le niveau des profits privés et la fraude fiscale des plus
riches ainsi que les projets industriels en cours incompatibles avec les engagements climatiques
pris au plus haut niveau !

René Fredon

Sanary : condamné en appel le maire démissionne…enfin !